Oh oui et, P.S., la pornographie c'est de la prostitution, en dépit de la ligne arbitraire que la société choisit de tracer entre les deux : quelqu'un, que ce soit la femme, son proxénète ou son agent, est payé en échange de l'utilisation de son corps à elle.
Donc les acheteurs de pornographie sont des clients de prostitution, ils gardent juste un pas de recul, même s'ils n'aimeraient pas être appelés ainsi. Vraiment étrange, une telle sensibilité aux mots, étant donné ceux qu'ils utilisent à propos des femmes dans la pornographie qu'ils achètent.
Bref.
Alors, vous êtes curieux de savoir comment baiser (définitivement pas faire l'amour) comme une "star de porno" (pute) ? Quelques indices utiles :
- Néglige ton corps et sa souffrance. Souviens-toi : il ne s'agit pas de toi, il s'agit des clients et de ce qu'ils veulent voir, des hommes qui te baisent et ce qu'ils veulent faire, et des hommes derrière la caméra et combien d'argent ils veulent se faire. Ton corps est seulement un véhicule pour les frissons sexuels des autres, qu'importe à quel point c'est douloureux ou pervers. Comme le disait "Buttman" John Stagliano, "le plaisir et la souffrance c'est la même chose, non ?" (1). Je suppose que c'est ce qu'on appelle jeter l'empathie par la fenêtre.
- Attends-toi à être humiliée. La plupart du plaisir que les acheteurs prennent vient du fait de te voir dégradée, que ce soit par une éjaculation faciale, ce qu'ils te disent (salope ! putain ! chienne ! dis que t'es une chienne), ou quand ils te giflent ou te crachent dessus ou te font des trucs merveilleux comme du ass-to-mouth ou pire. Ces trucs que les reluqueurs pro-porno disent parfois, à propos de respecter les femmes qui sont dans la pornographie parce qu'elles choisissent de le faire ? Des conneries. Ils ne te respectent pas le moins du monde et les mecs qui te besognent dessus non plus.
- Vois-toi depuis une perspective extérieure : une perspective de pornographe, une perspective de client. C'est pour ça que tu es là. Leur attention est largement focalisée entre tes jambes, d'où les zooms. Oh oui, et tes seins et ta bouche ont leur utilité aussi. C'est là que se situe ta valeur : dans ta disponibilité pour être utilisée. Tu penses qu'ils s'inquiètent de ce que ça te fait, si tu souffres ? Il n'y a pas de place pour la considération quand la caméra tourne et que les clients attendent, en trinquant sur des agressions comme une façon "d'être quittes" avec les femmes qu'ils ne peuvent pas avoir dans leur vie.
- Pénétration, pénétration, pénétration. C'est tout. Si ça peut être fait, quelqu'un voudra le voir, qu'importe à quel point c'est extrême. Vaginale, anale, orale... Maintenant la pénétration anale est devenue courante, la pression est de mise pour la prochaine innovation, et ton corps est sur le point d'être testé jusqu'à ses limites, pas très excitant mais risqué et douloureux, vie et mort. Comme l'avait dit un réalisateur de porno, Mitchell Spinelli, "Les gens en veulent plus. Ils veulent savoir combien de bites tu peux fourrer dans un cul... C'est comme "Fear Factor rencontre Jackass". Rendre ça plus hard, plus obscène, plus impitoyable." (2)
L'endurance est la qualité numéro 1 dont tu auras besoin ici : il ne s'agit pas d'aimer le sexe et d'être fière de ton corps comme ils te le disent dans les magazines. Tu penses que ce sera une expérience sexuelle excitante ? Réfléchis bien. On parle de baise brutale et prolongée, de toutes les façons possibles en risquant les déchirures, d'être tellement contusionnée que s'asseoir te fait mal, et chier du sang après. Et ils utiliseront n'importe quoi, pas juste leur bite : des objets ou des poings, tout ce qu'ils pourront forcer à te rentrer dedans. Tu es un ensemble de trous pour eux, de l'argent pour eux, plus l'acte sera extrême plus d'argent se feront. Difficile de voir l'humain quand on a des symboles de dollars devant les yeux.
- Sois préparée à remercier les hommes qui abusent de toi, à leur demander de te faire encore plus mal, de te baiser plus fort. L'agression physique n'est pas suffisante : ils exigent de savoir, pour le bénéfice du mec en train de se branler chez lui, pour qu'il jouisse, que ça te plaît. On la traite épouvantablement, et cette petite salope n'en a jamais assez ! Ou certaines audiences veulent savoir que tu souffres, alors sois prête à pleurer. Tu ne seras peut-être pas capable de t'en empêcher, de toute façon, ne t'en veux pas pour ça, tu ne sais pas à quoi tu vas te mesurer, ce face à quoi la résolution la plus forte n'est d'aucune aide. Ils ont un moyen de te briser, de t'humilier, de te faire souffrir jusqu'à ce que tes larmes coulent. Et n'oublie pas de dire merci comme une bonne fille quand ils ont fini, et de bien présenter à la caméra : ils veulent voir ces dégâts !
- Laisse de côté toute notion de choix, d'empowerment ou de contrôle. Tu feras ce qu'ils disent, pour éviter encore plus de violence hors caméra. L'obéissance est exigée : ils ont le pouvoir, ton corps est leur terrain de jeu, pour y faire ce qu'ils veulent. Qu'importe à quel point ils te traitent agressivement quand la caméra tourne, sache que ça peut être, et que ça sera, bien pire quand la elle sera éteinte.
- Et finalement, prends et utilise tout ce sur quoi tu pourras mettre la main pour t'engourdir, pour réduire la douleur, mentale et physique. Ce qui va arriver arrivera avec ou sans ton consentement, que tu luttes ou non, qu'ils aient à te frapper ou à te menacer d'abord ou non. Ton corps est là, et il va être gravement maltraité. Le mieux que tu puisses faire est de t'éloigner le plus possible, quoi qu'il en coûte. Alcool, drogues, dissociation. C'est ça, je crains que ce soit ta seule arme : tu es toute seule là-bas.
Ne confondez pas avec la réalité les mensonges disant des femmes dans la pornographie qu'elles ont du pouvoir et qu'elles sont respectées, qu'elles sont des "stars", que c'est un job glamour et excitant, ou tout ce qui parle de profiter du sexe, de libérer le sexe. La pornographie n'est qu'une question d'argent et de pouvoir. Les corps des femmes sont les moyens pour une fin, c'est à dire quelqu'un qui a du pouvoir sur une femme qui devient riche en la vendant, en vendant des images de sa maltraitance, et quelqu'un qui jouit là-dessus. Peut-être que s'ils en savaient un peu plus sur la réalité, les gens seraient moins enthousiastes à l'idée de "baiser comme des stars du porno", ou d'émuler la dynamique de l'abuseur et de l'abusée que nous appelons pornographie.
(1) Getting Off: Pornography and the End of Masculinity, R Jensen, Southend Press, 2007, p117
(2) Ibid, p70